Le régime matrimonial constitue un, statut, un ensemble de règles applicables aux actifs et dettes composant le patrimoine d’un couple, que celui-ci soit, marié ou pacsé (on parle plutôt de liquidation des intérêts patrimoniaux en cas de concubinage).
Séparation de biens, communauté réduite aux acquêts, communauté universelle ou encore participation aux acquêts, les régimes matrimoniaux auxquels un couple peut adhérer, sont variés.
Les études statistiques réalisées sur les 10 dernières années concluent à des résultats relativement variables, d’une étude à une autre. Certaines études indiquant que le régime de séparation de biens serait plébiscité à hauteur de 30 % (d’autres réduisant ce taux à 10 %). S’agissant des régimes de communauté (réduite aux acquêts ou universelle), cette statistique varie de 60 % à 70 %.
La tendance qui se dégage de façon constante de l’ensemble des études est :
- Le régime de communauté reste le plus plébiscité pour les couples mariés (+ d’un couple marié sur deux) ;
- Le régime de séparation de biens est de plus en plus sollicité en cas de mariage ; Il est le régime applicable par défaut par ailleurs pour les couples pacsés ;
- Le choix du régime de participation aux acquêts reste marginal (environ 3 % des couples mariés)
L’une des raisons pour lesquelles les couples recourent au régime de séparation de biens reste l’augmentation constante du nombre de divorces (ou de ruptures de pacs), la motivation consistant alors à préserver une forme d’autonomie de chacun des époux, dans la gestion de leurs intérêts et à faciliter une séparation le cas échéant.
Qu’est-ce que liquider un régime matrimonial ?
Liquider un régime matrimonial ne consiste pas à partager les biens des époux, ni à répartir leurs éventuelles dettes, ce qui constitue l’étape finale de la dissolution du régime matrimonial. La liquidation est l’étape préalable, qui consiste à identifier l’ensemble des actifs et dettes des époux, et à les valoriser, puis à identifier et qualifier les mouvements qui ont pu intervenir entre eux, sous la forme d’une récompense, d’une créance entre époux ou encore de comptes d’indivision.
Ce faisant, la liquidation est l’étape qui précède le règlement du régime matrimonial et qui est essentielle pour parvenir à un règlement (détermination du sort des biens entre autres).
De manière extensive, la liquidation du régime matrimonial renvoie, en tout cas en pratique, à l’ensemble des opérations qui consistent à qualifier, chiffrer mais également régler le sort des biens, dettes des époux, et mouvements de valeurs entre eux.
Dois-je être d’accord avec mon époux sur la liquidation de mon régime matrimonial, pour qu’on puisse divorcer ?
Tout dépend de la voie empruntée par les époux pour divorcer. Si les époux souhaitent divorcer à l’amiable, il est nécessaire qu’ils soient d’accord également sur la liquidation du régime matrimonial (qui récupère l’appartement ou la maison ? Est-ce qu’on la vend ? Se partage on pour moitié le prix de vente (ou mon conjoint doit il me verser la moitié de la valeur du bien qu’il récupère) ou l’un de nous deux a-t-il plus de droits ? Notamment car j’ai remboursé le crédit plus que mon conjoint ou parce qu’une donation d’un proche a constitué un apport ou a permis de rembourser de façon anticiper l’emprunt. Quid si les remboursements ont été inégalitaires mais réalisés avec nos salaires…).
En effet le code civil contraint les époux qui veulent divorcer par consentement mutuel, à liquider et à prévoir la répartition de leurs biens. Il est donc inenvisageable de signer une convention de divorce dans le cas, par exemple, où les époux seraient d’accord sur ce qui concerne les enfants, ou uniquement sur le fait de divorcer, sans respecter cette étape, à peine de validité de la convention !
En cas de divorce judiciaire en revanche, il n’est nullement exigé que les époux se mettent d’accord sur ces aspects, les différences de vues sur les conséquences patrimoniales du divorce étant par ailleurs très largement au cœur des conflits. Ainsi, sauf divorce par consentement mutuel judiciaire, le divorce judiciaire prononcé aux torts d’un époux (ou des deux), ou du fait de la séparation ou encore lorsque les époux n’ont accepté que le principe du divorce (à l’exclusion de ses conséquences), il n’est pas nécessaire que les époux tombent d’accord.
A quel moment a lieu la liquidation du régime matrimonial ?
Là encore, tout dépend de la voie empruntée. En cas de divorce amiable, la liquidation a lieu à la signature. En cas de divorce contentieux, celle-ci a lieu, en principe, postérieurement au prononcé du divorce. Ce qui signifie qu’une deuxième procédure, consécutive à l’achèvement de la procédure de divorce, devra être diligentée, lorsque les désormais « ex-époux », ne sont pas parvenus à tomber d’accord sur les conséquences financières résultant de leur divorce.
Il reste qu’une possibilité est ouverte au tribunal pour traiter la liquidation du régime matrimonial, en même temps que le divorce, lorsque les parties ont suffisamment avancé dans leurs discussions financières et qu’elles sont, dès lors, en mesure de démontrer leurs désaccords subsistants.
Pour ce faire, deux possibilités. Soit les parties acceptent de signer une déclaration commune récapitulant l’ensemble de leurs désaccords financiers et leurs propositions de répartition, soit les parties ont sollicité, au stade des mesures provisoires, la désignation d’un notaire qui est intervenu en qualité d’expert, chargé d’établir un projet d’état liquidatif et de règlement de l’entier régime matrimonial. Dans ce dernier cas, c’est un rapport qui est transmis par le notaire au tribunal qui doit alors trancher les derniers désaccords.
Le code civil précise que la preuve des désaccords subsistants peut néanmoins être rapportée par d’autres modes de preuves, lesquels sont donc libres.
Quels peuvent être les désaccords qui subsistent ?
En fonction du régime communautaire applicable, les qualifications retenues seront différentes. Mais, pour l’essentiel, la grande majorité des différences de vue entre les époux, reste de deux natures, d’une part : le sort du bien immobilier et le montant de l’indemnité d’occupation due. En général, cette question du sort du bien (et de l’indemnité due) est liée à la valeur du bien, celui qui entend le récupérer (souvent celui qui l’occupe, étant rappelé que la loi ne prévoit d’attribution dite préférentielle, qu’au profit de l’occupant) faisant valoir une estimation inférieure à celle revendiquée par l’autre. D’autre part, les parties se déchirent sur l’utilisation de fonds propres d’un époux au profit de l’autre ou de la communauté, voire l’utilisation de fonds communs qui n’aurait profité qu’à l’une des parties : il s’agit des récompenses dues par la communauté, ou par l’un des époux, ou encore des créances entre époux. Des règles très précises et très techniques régissent l’ensemble de ces questions. Il est impératif d’être accompagné d’un avocat pour effectuer les démonstrations nécessaires et produire les pièces qui s’imposent.
Différence entre un notaire expert et notaire commis
La liquidation du régime matrimonial requiert l’intervention d’un notaire, en cas de partage complexe, et ainsi, entre autres, lorsqu’il existe un bien immobilier. En cas de procédure de divorce, il peut être intéressant de solliciter son intervention, avant même le prononcé de divorce, en qualité de notaire expert chargé de récolter l’ensemble des renseignements relatifs aux biens et dettes des époux et aux mouvements de valeurs qui peuvent exister entre eux.
L’intérêt de solliciter cette mesure peut être, entre autres, de renseigner le tribunal sur la surface financière des parties, lorsque l’une d’elles n’est pas évidente à déterminer, ainsi en présence d’un chef d’entreprise, et ce, afin de permettre au tribunal de se prononcer plus aisément sur la prestation compensatoire qui est due à l’autre conjoint. Le cas échéant, il est également possible de prendre en compte les droits de chacun à valoir dans la liquidation du régime matrimonial.
L’autre intérêt peut être d’avancer un maximum sur le règlement financier du divorce, et de ne pas en différer l’issue d’avantage. Ce faisant, il faut rappeler qu’un rapport d’expertise déposé par un notaire expert, constitue également un outil de négociation entre les parties, ces dernières parfaitement informées de leurs droits, étant plus à même de convenir d’un règlement, et de faire des concessions sur tel ou tel terrain.
Très différente est la désignation du notaire commis, lorsqu’une fois le divorce prononcé, le tribunal désigne le notaire, à l’effet d’établir un projet de liquidation du régime matrimonial. Le cas échéant, le notaire doit établir des procès-verbaux, à l’issue de chaque rendez-vous auquel il a convoqué les parties, enregistrant leurs positions sur tel ou tel aspect, et qui, à l’issue de cette première phase, doivent faire l’objet de dires récapitulatifs reprenant les prétentions qu’ils entendent soumettre au tribunal. Celles qui n’auraient pas été relatées par le notaire commis dans son PV de dires récapitulatifs, ne peuvent, une fois que le juge commis a adressé son rapport sur ce PV, au tribunal, faire l’objet d’un débat. Elles sont dites irrecevables, ce qui permet d’avancer et d’éviter d’incessants allers-retours entre le notaire et le tribunal.
Il est impératif d’être accompagné d’un avocat afin d’agir en connaissance de cause et d’entreprendre la stratégie adéquate, tant les enjeux peuvent être considérables.
Compétence du juge chargé du contrôle des expertises ou compétence du juge commis
Les parties sont amenées à échanger des pièces, dans le cadre des discussions relatives à la liquidation de leur régime matrimonial. Lorsque le notaire désigné l’est en qualité de notaire expert, et qu’il sollicite la délivrance d’une pièce qu’il n’obtient pas, la partie qui a intérêt à ce que l’autre la produise, peut saisir le juge chargé du contrôle des expertises, afin d’en solliciter l’injonction de la produire, sous astreinte. A défaut, la partie défaillante n’est nullement contrainte de produire la pièce litigieuse.
Lorsque le notaire est désigné en qualité de notaire commis, c’est au juge commis qu’il faut s’adresser pour solliciter la communication, sous astreinte, de telle ou telle pièce.
Le juge commis reste le juge chargé de trancher toute difficulté dans le cadre des opérations de liquidation-partage.
Que se passe-t-il si l’un des ex-époux refuse de signer l’acte final de liquidation-partage du régime matrimonial ?
Il n’est pas rare qu’une fois que le tribunal a tranché l’ensemble des désaccords des parties, l’une des parties refuse de signer l’acte de liquidation-partage établi par le notaire, conformément au dernier jugement. Auquel cas, il appartient à la partie la plus diligente (celle qui a signé en général) de saisir le tribunal d’une demande d’homologation de l’acte de liquidation-partage.
De façon générale, il est vivement conseillé aux parties d’anticiper le règlement de leur régime matrimonial, dès la séparation. A cette fin, les parties doivent être correctement accompagnées de leur avocat, qui sera à même de déterminer la stratégie adéquate. Certaines mesures, si elles sont couteuses et peuvent ralentir le prononcé du divorce (comme la désignation d’un notaire expert et d’un sapiteur), restent de précieux outils, qui, utilisés à bon escient, permettent d’obtenir un règlement juste et approprié.