Requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat à temps plein
Constitue un salarié travaillant à temps partiel le salarié dont la durée de travail est inférieure :
- A la durée légale du travail ou, lorsque cette durée est inférieure à la durée légale, à la durée du travail fixée conventionnellement pour la branche ou l’entreprise ou à la durée du travail applicable dans l’établissement ;
- A la durée mensuelle résultant de l’application, durant cette période, de la durée légale du travail ou, si elle est inférieure, de la durée du travail fixée conventionnellement pour la branche ou l’entreprise ou de la durée du travail applicable dans l’établissement ;
- A la durée de travail annuelle résultant de l’application durant cette période de la durée légale du travail, soit 1 607 heures, ou, si elle est inférieure, de la durée du travail fixée conventionnellement pour la branche ou l’entreprise ou de la durée du travail applicable dans l’établissement
En 2023, 17,4 % des salariés hors apprentis en France (hors Mayotte) travaillent à temps partiel dans leur emploi principal – contre 7 % des salariés en 1975.
Le temps partiel concerne :
- 26,6 % des femmes contre 7,8 % des hommes ;
- 26 % des 15-24 ans et 24,8 % des 55 ans et plus ;
- 30,1 % des employés contre 8,7 % des cadres.
Il concernait à peine plus d’un million de travailleurs en 1975 et représente aujourd’hui 4 millions de salariés (chiffre inférieur au pic de 4,5 millions enregistrés en 2017)
Telles sont les données renseignées par la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) qui n’est autre que la direction du Ministère du Travail qui produit des analyses, des études et des statistiques sur les thèmes du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Le recours au temps partiel est une forme d’emploi qui s’est fortement développée depuis la fin des années 1970. Il est concomitant de l’accélération de l’entrée des femmes sur le marché du travail, mais aussi de la montée du chômage et, en réponse, du déploiement des politiques de l’emploi. Les politiques publiques ont d’ailleurs alternativement favorisé cette forme d’emploi et cherché à en limiter les effets. Il est aussi le reflet d’une inégalité d’accès au marché du travail, entre femmes et hommes en premier lieu, selon l’âge ou entre générations. Il est donc un paramètre important de la mesure de la durée du travail et plus généralement des conditions d’emploi au sein d’une économie ou d’une catégorie sociale.
Ce qui doit figurer dans le contrat de travail écrit du salarié
« Le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit.
Il doit impérativement mentionner :
- 1° La qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d’aide à domicile et les salariés relevant d’un accord collectif conclu en application de l’article L. 121-44, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois
- 2° Les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification ;
[…]
4° Les limites dans lesquelles peuvent être accomplies des heures complémentaires au-delà de la durée de travail fixée par le contrat.
L’impossibilité de prévoir son rythme de travail
En application de cette dernière disposition, la jurisprudence considère que le contrat de travail à temps partiel doit être requalifié en contrat de travail à temps plein :
- Lorsque le salarié est placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il doit travailler et qu’il est ainsi, à la disposition de l’employeur, ce qui est le cas :
- Lorsqu’un employé a eu à subir des « variations importantes dans l’horaire de travail mensuel du salarié, ce dont il résultait que la durée exacte du travail convenue, qui ne pouvait résulter d’une moyenne calculée a posteriori n’était pas établie, et que le salarié s’était trouvé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et dans l’obligation de se tenir en permanence à la disposition de l’employeur, peu important la faculté de refuser des missions. » (C.Cass, Soc, 31 janvier 2012, Pourvoi n° 10-27.599) ;
- Lorsque « la répartition des horaires était telle que le salarié travaillait six jours sur sept durant trois semaines avant de bénéficier d’une semaine de repos la quatrième semaine et d’une semaine de repos supplémentaire toutes les trente-six semaines et retenu qu’une telle répartition des horaires de travail n’était pas compatible avec un autre emploi à temps partiel et le contraignait nécessairement à demeurer constamment à la disposition de son employeur (C.Cass, Soc, 9 janvier 2008, pourvoi n° 06-44.458)
- En « l’absence de respect du délai de prévenance prévu par l’article L. 3123-21 du code du travail […] » (C.Cass, Soc, 27 mars 2019, pourvoi n° 17-21.833)
- Lorsque « les horaires de travail du salarié à temps partiel variaient constamment et que la durée du travail convenue était fréquemment dépassée, sans que l’employeur ne justifie du respect du délai de prévenance contractuel, en sorte que, compte tenu de l’incertitude avérée de ses horaires de travail, le salarié était contraint de demeurer à la disposition permanente de l’employeur (C.Cass, 27 mars 2019, pourvoi n° 16-28.774)
L’intérêt de faire requalifier un contrat de travail à temps partiel en contrat à temps plein
L’intérêt de faire requalifier un contrat de travail à temps partiel en contrat à temps plein est, entre autres, d’obtenir au titre des rappels de salaires sur les trois dernières années de travail et autres indemnités :
- la différence entre ce qui a été versé au salarié, et un salaire sur la base d’un temps plein ;
- l’indemnité forfaitaire de travail dissimulé lorsque la dissimulation des heures faites en plus était intentionnelle ;
- des indemnités de fin de contrat (licenciement sans cause réelle et sérieuse, indemnité de licenciement, indemnité de préavis et de congés payés non pris…) calculées sur la base d’un salaire à temps plein reconstitué et non sur la base du salaire qui a été versé.
Il est à noter que le non-règlement des heures supplémentaires ou complémentaires, dont le nombre et la fréquence ou l’absence d’encadrement peuvent donner lieu à requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat à temps plein, peut justifier une rupture du contrat de travail par le salarié lui-même, le cas échéant, aux torts de l’employeur.
Il s’agit d’une prise d’acte. L’opération étant audacieuse, il convient d’être accompagné en amont par un avocat afin de réaliser l’opération de façon régulière.