La rupture conventionnelle est le mode de rupture amiable de rupture du contrat de travail à durée indéterminée, qui repose sur un accord entre le salarié, qui n’a pas à démissionner, et l’employeur, qui n’a pas à licencier.
Aussi pratiqué qu’il soit (on enregistrait en 2022/2023 plus de 500.000 ruptures conventionnelles), ce mode de rupture reste relativement récent, pour avoir été créé en 2008.
Avantages pour l’employeur
La rupture du contrat de travail pouvant intervenir dès le lendemain de l’homologation de la convention de rupture conventionnelle par l’inspection du travail, soit au 16ème jour suivant son envoi, ce mode de rupture du contrat peut paraître plus rapide qu’une démission dès lors que le salarié n’a pas de « préavis » à effectuer, les parties pouvant dès lors convenir de la date de leur choix sous réserve qu’elle soit postérieure à l’homologation.
Mais surtout, un tel mode de rupture limite les risques contentieux, en évitant à l’employeur de licencier son salarié, ce qui laisserait alors la possibilité à ce dernier de le contester et de solliciter des indemnités supplémentaires. Le seul contentieux, le cas échéant, que le salarié peut porter, a pour objet la contestation de la validité de la convention de rupture conventionnelle.
Avantages pour le salarié
L’intérêt pour le salarié est double.
D’une part, à la différence du cas où le salarié démissionne, il percevra l’allocation de retour à l’emploi sous réserve que les conditions générales d’accès à l’ARE soient remplies.
D’autre part, le salarié perçoit, a minima, une indemnité de licenciement s’il y a droit.
Menacé régulièrement de réformes, seul le volet social de ce mode de rupture a été modifié.
Côté patronal, le forfait social patronal du sur l’indemnité de rupture conventionnelle, qui était auparavant de 20 %, a été remplacé par une contribution patronale versée à la caisse nationale d’assurance vieillesse, à hauteur de 30 % de la fraction du montant de l’indemnité versée qui est exclue de l’assiette des cotisations sociales.
Côté salarié, l’indemnité de rupture conventionnelle n’est pas soumise :
- à cotisations sociales ainsi qu’à impôts sur le revenu lorsqu’elle correspond au standard légal ou conventionnel.
Lorsque celle-ci l’excède, l’exonération s’applique dans la limite du double du PASS (pour 2024 : 92.736 €) à la moitié de l’indemnité convenue ou – si ce montant est supérieur – jusqu’au double de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l’année précédant la rupture du contrat de travail.
- à CSG-CRDS dans la limite du montant minimal d’indemnité prévu par la loi, la convention collective ou l’accord collectif, ou – si ce montant est inférieur – dans la limite du montant de l’indemnité exonérée de cotisation sociale (lequel est plafonné au double du PASS soit 92.736 € pour 2024)
Lorsque l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle versée est supérieure à 463 680 €, elle est soumise à cotisations sociales et à CSG CRDS dans son intégralité de sorte qu’aucune exonération n’a lieu.
Ce régime social et fiscal, qui peut paraître avantageux à certains égards, n’est pas nécessaire le régime le plus favorable, en comparaison avec celui applicable à d’autres modes de rupture.
L’intérêt pour le salarié, de ce mode de rupture, résulte donc souvent, avant toute autre chose, de la possibilité de percevoir le chômage.
Rappel des conditions générales pour percevoir l’allocation de retour à l’emploi
Pour percevoir l’ARE il faut :
- Avoir perdu involontairement son emploi
Il faut avoir été licencié (sauf abandon de poste) ou avoir convenu d’une rupture conventionnelle ou être dans l’un des cas où France Travail peut considérer la démission comme légitime (exemple : non-paiement des salaires ou déménagement pour suivre son conjoint). Le non-renouvellement du CDD permet également de percevoir l’ARE.
- Être apte physiquement à l’exercice d’un emploi ;
- Résider en France
- S’inscrire auprès de France Travail dans les 12 mois suivant la fin de son contrat de travail ;
- Avoir travaillé 130 jours ou 910 heures dans les 24 derniers mois à la date de fin de son contrat de travail ; Cette durée minimale est évaluée sur les 36 derniers mois précédant la fin du contrat de travail lorsque le demandeur est âgé de plus de 53 ans
Combien vais-je percevoir au titre de l’ARE ?
L’allocation de retour à l’emploi perçue est une allocation mensuelle dont le montant dépend du nombre de jours de chaque mois.
Le principal paramètre pris en compte pour le calcul de l’ARE est le salaire perçu pendant les périodes de travail du salarié sur les 24 mois précédant la fin de son contrat (36 mois pour les plus de 53 ans).
S’agissant du calcul, celui-ci dépend du montant des salaires perçus.
Ainsi, lorsque le salaire mensuel brut était inférieur à 1.281,15 €, l’allocation journalière est de 75 % du salaire brut.
Lorsque le salaire est compris entre 1 281,15 € et 1 403,38 €, l’allocation journalière est de 31,59 € par jour.
Lorsque le salaire est compris entre 1 403,38 € et 2 372,87 €, l’allocation est de 40,4 % du salaire journalier brut + 12,95 € par jour.
Enfin, lorsque le salaire est compris entre 2.372,87 € et 14 664 €, l’allocation est de 57 % du salaire journalier brut.
Lorsque le salarié a exercé une activité à temps partiel, l’ARE est par ailleurs minorée.
En outre, une dégressivité de l’allocation peut être appliquée en fonction du montant de l’allocation versée et de la date à la laquelle le contrat a été rompu.
Les différés d’indemnisation
Le versement de l’allocation de retour à l’emploi n’est jamais concomitant de la fin du contrat de travail, l’ex-salarié, devenu bénéficiaire du chômage, subissant plusieurs délais dits « de carence » avant de percevoir son allocation.
3 types de délais s’appliquent :
- Le délai de carence légal
Il s’agit du délai de 7 jours, décompté à partir du lendemain de la fin du contrat de travail du salarié, pendant lequel ce dernier ne percevra aucune allocation.
- le Différé d’indemnités de rupture
Lorsque l’indemnité de licenciement négociée est supérieure au seuil minimal prévu par le code du travail, y compris si le montant supérieur découle de l’application d’une convention collective ou d’un accord d’entreprise ou de branche prévoyant un montant plus favorable au salarié, France Travail (anciennement Pôle emploi) diffère le versement de l’allocation de retour à l’emploi, selon une durée qui variera selon l’importance du dépassement.
Ce différé ne peut néanmoins jamais dépasser 150 jours. Dans la limite de cette durée, le nombre de jours pendant lequel l’allocataire ne percevra rien est calculé en divisant la fraction des indemnités excédant le minimum légal, par 107,9.
Exemple :
Voici un salarié qui a acquis 3 ans d’ancienneté, avec salaire moyen de 3.000 € brut.
L’indemnité légale de licenciement due est de 3.000 x ¼ x 3 = 2.250 €.
Le salarié négocie une indemnité de départ, de 10.000 €.
Il subira un délai de carence de (10.000 – 2.250) /107,9 = 7.750 / 107,9 = 71 jours.
La durée d’indemnisation restera en revanche de 12 mois.
Le différé ne peut néanmoins jamais être supérieur à 150 jours dans tous les cas et supérieur à 75 jours en cas de licenciement pour motif économique.
- Le différé « congés payés »
S’il reste au salarié des congés payés non pris à la date de fin de son contrat de travail, une indemnité compensatrice de congés payés non pris est versée. Le cas échéant, un différé supplémentaire s’applique, lequel est calculé en jours selon la formule suivante : indemnité compensatrice de congés payés versée / le montant du salaire journalier du salarié.
L’ensemble de ces délais se cumule mais ne réduit pas la durée d’indemnisation. Ils ne font que différer le point de départ du versement des indemnités.
Est-il possible d’éviter ou d’amoindrir les différés d’indemnisation ?
Afin de réduire ou d’amoindrir les différés d’indemnisation, il est possible de convenir entre les parties d’une indemnité forfaitaire de conciliation devant le conseil des prud’hommes, l’avantage étant pour le salarié d’échapper au différé d’indemnités de rupture si l’indemnité convenue est inférieure ou égale à un certain montant fixé par décret, dont l’importance dépend de l’ancienneté du salarié.